MUSÉE DE L’ANCIENNE ELEUTHERNA

À environ 380 mètres au-dessus du niveau de la mer, sur les pentes du mont Ida (Psiloritis), Eleutherna se dresse sur une proéminence qui ressemble à un vaste navire de pierre amarré dans un vert ineffable, sa proue pointant vers le nord-ouest. La situation d’Eleutherna au cœur de la Crète, à peu près à mi-chemin entre l’ancienne Kydonia (l’actuelle Chania) à l’ouest, Knossos à l’est, et Phaistos et Gortyn au sud, a favorisé le développement de la ville. Cette situation et ses liens avec la mer ont constitué la base d’une société ouverte sur le monde et sujette à des hauts et des bas périodiques, comme l’ont montré les fouilles et les investigations de l’Université de Crète, entreprises systématiquement depuis 1985.

L’ancienne Eleutherna a livré ses secrets, qui datent d’environ 3000 ans avant J.-C. jusqu’au XIVe siècle de notre ère. Les fouilles de la nécropole d’Orthi Petra montrent que le premier âge du fer, en particulier la période allant de 900 avant J.-C. à la fin du VIe siècle ou au début du Ve siècle avant J.-C., a été la période la plus importante de la ville, directement associée à l’aube de la civilisation grecque et à Homère (l’Iliade et l’Odyssée).

C’est pourquoi nous avons créé le Bois d’Eleuthernie, un parc archéologique qui comprend l’ancienne ville avec des sentiers, des aires de repos et des panneaux d’information. Les visiteurs peuvent profiter à la fois de la nature – la faune et la flore – et des antiquités dans un paysage enchanteur.

Le musée

L’histoire d’Eleutherna est illustrée par les vestiges matériels de sa culture présentés dans trois salles consécutives.

Les objets exposés dans la salle A (vases, sculptures, armes, outils, figurines en argile, en pierre, en métal, en faïence, etc., inscriptions, etc.) constituent une introduction à la vie publique, politique, religieuse, sociale et privée d’Eleutherna à travers les âges.La salle est dominée par une grande vitrine contenant des objets importés d’autres villes crétoises et de pays plus lointains : Attique, Péloponnèse, Cyclades, îles de la mer Égée orientale, Asie Mineure, Chypre, Phénicie et côte syro-palestinienne, Égypte… Ils illustrent l’aventure « odysséenne “ et rappellent Homère qui raconte les voyages d’Ulysse et les ” villes qu’il a vues et les idées qu’il a apprises » (Odyssée, Livre 1, 3).

La salle B présente la vie religieuse et les cultes à Eleutherna du premier âge du fer à l’époque byzantine. Elle abrite également le monument 4A, un sanctuaire de héros qui, s’il est interprété correctement comme un cénotaphe, est l’un des premiers monuments au soldat inconnu de l’histoire mondiale.Elle abrite également l’une des découvertes les plus importantes de la nécropole d’Orthi Petra, l’Eleutherna Kore, qui est étroitement associée à la célèbre Dame d’Auxerre, l’exquise sculpture daidalique aujourd’hui conservée au Louvre à Paris.La salle C est consacrée aux cimetières d’Eleutherna.
L’exposition se concentre sur les découvertes de la nécropole d’Orthi Petra, car elles illustrent le récit homérique, par exemple le rituel des bûchers funéraires, tel qu’il est décrit dans l’Iliade, en particulier dans le passage décrivant le bûcher de Patrocle (Livre XXIII), et certains aspects de la daita (diète) homérique. Il dépeint également une société de guerriers héroïques et de princesses impérieuses, comme celles enterrées dans le bâtiment M, qui contenait les restes de quatre femmes âgées de 13,5 à 72 ans qui occupaient des positions importantes dans la société de l’Archaïque ancien d’Eleutherna. Une autre tombe taillée dans la roche, la « tombe des guerriers », abritait les restes incinérés des illustres guerriers d’Eleutherna, avec leurs opulents cadeaux funéraires composés d’armes, de bijoux et d’outils. C’est dans cette tombe que se trouvait le bouclier de bronze aujourd’hui exposé comme emblème dans l’entrée du musée.

L’exposition se termine par la reconstitution du bûcher funéraire bien conservé d’un jeune guerrier âgé d’environ 30 ans, incinéré avec son compagnon. Ce bûcher, qui date d’environ 720-700 avant J.-C., comportait également un élément unique : le corps d’un homme corpulent, âgé de 30 à 40 ans, probablement un prisonnier de guerre exécuté devant le bûcher du guerrier. Cette découverte unique rappelle la description dramatique faite par Homère du massacre des prisonniers de guerre troyens par Achille devant le bûcher de Patrocle (Iliade, Livre XXIII, 22-23, 175-176,180-183) et de tout le rituel du bûcher (110-179 ss.).

C’est pourquoi l’exposition actuelle se concentre sur Homère. C’est la colonne vertébrale, le fil conducteur. La Crète peut désormais s’appuyer sur deux piliers : la civilisation minoenne et Homère. Ce sont les points forts de son histoire ancienne.

Matériel audiovisuel

En plus du matériel et des textes explicatifs, des films spéciaux et des présentations audiovisuelles enrichissent les expositions évocatrices du musée.

Les contacts et les échanges entre l’Orient et l’Occident dans l’Antiquité, attestés par des objets importés de la mer Égée et du Proche-Orient, démontrent le caractère extraverti de la ville.

Ces voyages, provenances et échanges sont illustrés sur une immense carte projetée à l’intérieur de la grande vitrine contenant ces objets.Un autre film explore l’histoire de Phronime racontée par Hérodote (Histoires, 4.154-161).Dans la salle B, un long métrage présente l’aventure de la célèbre statue dite de la Dame d’Auxerre depuis sa découverte, son voyage en France et son acquisition par le Louvre, jusqu’à l’identification de son origine par le professeur Nikolaos Stampolidis et, enfin, à sa réunion avec la Coré d’Eleutherna, pour la première fois depuis son départ de Crète à la fin du XIXe siècle, au Musée d’art cycladique en 2004/5.Dans la même salle, une présentation audiovisuelle explique le monument auquel appartenait la Kore.

Dans la salle C, un film achevé en 1996 présente le rituel funéraire illustré par les découvertes du bûcher funéraire de ΛΛ et la description homérique (Iliade, Livre XXIII). Enfin, le film projeté dans la zone spéciale de la salle A résume la signification du sous-titre du musée, Homère en Crète.